Décembre 1792


Décembre 1792 est important, pas pour le pauvre premier décret qui n'engage que la sémantique, mais parce que c'est la première véritable discussion concernant l'instruction publique. Il aura donc fallu attendre plus de 3 ans.

Troisième obstruction [première avec Talleyrand octobre90-septembre91, seconde avec la déclaration de guerre en avril 1792 (surtout absence de discussion sous la Législative)]. Ici, ce sera l'auteur du rapport lui-même qui va obstruer les décrets relatifs à l’instruction primaire, en insistant sur le secondaire.



12 décembre. Chénier.

https://artflsrv04.uchicago.edu/philologic4.7/archparl/navigate/55/2/3/

[anecdote, la session commence avec le procès de Dietrich / voir Marseillaise dans les documents relatifs à 1870) .Lors du rapport Condorcet en avril 1792, c'est la déclaration de guerre qui avait vampirisé l'attention (Condorcet y contribuant...)]

(intervient un peu plus loin celui qui vampirisera celui-ci (nous verrons que ce n'est pas la raison principale de l'absence de décrets significatifs) : le procès de Louis XVI à venir).



AP tome LV /p25 Chénier.

p27

Le Président met aux voix le premier article.


La Convention l'adopte, sans discussion, en ces termes :

« La Convention nationale, sur le rapport de son comité d'instruction publique, décrète :

TITRE PREMIER.
Enseignement.
Art. 1er.

« Les écoles primaires formeront le premier degré d'instruction. On y enseignera les connaissances rigoureusement nécessaires à tous les citoyens. Les personnes chargées de l'enseignement dans ces écoles s'appelleront instituteurs.


Durand- Maillane réclame contre l'adoption de cet article et demande la parole sur le plan général du comité.

Le Président.
Vous avez la parole.  


Et c'est fini...

D'autres discourent contre. Chénier défend mollement (ses paroles ne sont pas retranscrites). 

[note à propos du décret : l'absence du terme "institutrices" est dommage; elles sont mentionnées dans des articles suivants (non discutés). Le masculin est employé en tant que neutre.]


Lettre du ministre de la guerre.

[...]

Rapport de Lanthenas en annexe. Début fin de la page 33 jusqu'à la fin de /journée du 12


La publication

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k48952f?rk=21459;2


Ode au secondaire alors que le rapport concerne l'établissement de l'école primaire.
Je suis d'accord avec lui à propos du secondaire. Je ne suis absolument pas d'accord pour en parler à ce moment, et en faire le sujet d'entrave.
Le projet en lui-même était louable. Garçons et filles sans distinction, accès au secondaire public pour ceux qui veulent (filles inclues ?).



Le rapport sur la composition des livres par Arbogast :

CIP 26 novembre, imprimé pour Convention 5 décembre 1792

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k4232486m

Rapport et projet de décret sur la composition des livres élémentaires destinés à l'instruction publique , présentés a la Convention nationale, au nom du comité d'Instruction publique, par L. F. A. Arbogast, député du département du Bas-Rhin


(à mettre en perspective avec les discours environnant l'absurde improvisation de l'école normale de l'an III ; dès décembre 1792, la Révolution s'était attelée à cette tâche)



________ _____



La discussion reprend le 14 décembre.

https://artflsrv04.uchicago.edu/philologic4.7/archparl/navigate/55/2/6/

p56


La parole est à Jacob Dupont.

Discours anti religieux. /59.


Beaucoup d'altercations durant son discours, mais dès la fin, la Convention renvoie la suite de la discussion à une prochaine séance.

!? Qui a décidé que Jacob Dupont prendrait la parole ? Il finira dans un asile en 1794.
A l'instar de Lanthenas, quelle que puisse être son opinion à ce sujet, il est absolument contre-productif de l'exposer ainsi. L'objectif n'est pas de se faire plaisir à s'offrir une tribune, mais de faire (enfin) aboutir un projet d'instruction primaire, notamment émancipé de religion.


______________ _____


Repris le 18 décembre.

https://artflsrv04.uchicago.edu/philologic4.7/archparl/navigate/55/2/11/

p133


Le Président.
L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de décret, présenté au nom du comité d'Instruction publique sur l'organisation des écoles primaires. La parole est au rapporteur pour soumettre à la discussion la suite des articles.


Marie-Joseph Chénier, rapporteur, monte à là tribune.


Lanthenas.
Je demande auparavant la parole pour une motion d'ordre.


Le Président.
Vous avez la parole.


Lanthenas.
Je demande qu'avant de passer à la discussion du décret sur les écoles primaires, on discute les bases générales de l'instruction publique et la question de savoir s'il y aura plusieurs degrés d'instruction.


Et c'est fini...

Ce passage est ahurissant. Chénier, rapporteur, se fait interrompre par Lanthenas, l'auteur du rapport, qui va faire dériver la discussion de sorte que les autres articles concernant l'instruction primaire ne seront pas soumis au vote.
On voyait déjà de toute façon dans son rapport une insistance inappropriée
à propos du second degré, tellement polémique, alors que l'instruction primaire devait être soumise au vote. (James Guillaume dit que Lanthenas [l'auteur du rapport] n'était pas en accord avec le projet du Comité).
Je suis évidemment favorable au second degré public, et fustigerai ses adversaires (Sieyes, Daunou, Fourcroy au moment décisif (fin93), etc). C'était cependant le plus mauvais moment pour le défendre, alors que se jouait l'instauration des écoles primaires, et que le secondaire public rencontrait énormément d'hostilité, de toutes parts (nous le verrons tout au long, juin 93, octobre-decembre 93).
D'autant plus que Lanthenas en rajoute des tonnes sur l'égalité sociale que cela engendre, sujet aussi honni de beaucoup, jusqu'à Cloots (nous le verrons fin 93, Cloots était un capitaliste souhaitant le second degré pour les possédants).
Ces idées paraissent très honorables, mais les écrire au coeur d'un rapport sur l'instruction primaire est d'une contre-productivité gigantesque.



suite


Rabaut-Saint-Etienne.
Je prie l'Assemblée d'observer qu'elle a été mue par de puissants motifs, lorsqu'elle a décrété qu'on lui présenterait un rapport particulier sur les écoles primaires. Il y a ici une distinction à faire. La nation doit absolument la doctrine qui enseignera dans les écoles primaires les devoirs de citoyens. C'est pour elle un devoir absolu, aussi sacré que celui qui l'oblige d'entretenir les pauvres et de soulager les malheureux. ( Vifs applaudissements.) Ce qu'elle ne doit qu'indirectement, c'est l'enseignement des arts et des sciences, c'est la manière de perfectionner l'esprit humain pour améliorer les mœurs, sans lesquelles il ne peut exister de République. Faisons des hommes; faisons des citoyens : toute la France le demande. On ne nous demande pas des collèges ; mais on nous demande des écoles primaires. Je conclus à ce qu'on discute séparément cet objet. (Nouveaux applaudissements).


Masuyer appuie la proposition de Lanthenas et propose qu'on ne s'occupe des écoles primaires qu'après avoir décidé cette question. Y aura-t-il plusieurs degrés d'instruction?


Jean-Bon-Saint- André appuie la proposition de Rabaut-Saint-Etienne et combat celle de Masuyer.


Marie-Joseph Chénier rapporteur, insiste pour la discussion sur les écoles primaires.


Sergent demande que les projets proposés sur l'instruction soient tous déposés sur le bureau pour être imprimés et distribués.


(La Convention décrète que la discussion ne se bornera pas à l'organisation des écoles primaires, mais qu'elle s'ouvrira sur l'ensemble du projet concernant l'instruction en général.)


Le Président.
La discussion est ouverte, la parole est au citoyen Petit.


[...]

Masuyer, hostile au projet le 12 décembre, appuie Lanthenas...


Discours de :

- Petit.
[coupure guerre.]
- Lequinio,
- Ducos.
[coupure comité des domaines]
- Leclerc


Le Président.
Je donne la parole au rapporteur pour répondre aux précédents orateurs qui se sont exprimés sur le projet.


Marie-Joseph Chénier, rapporteur, monte à la tribune.


Marat.
Quelque brillants que soient les discours que l'on nous débite ici sur cette matière, ils doivent céder place à des intérêts plus urgents. Vous ressemblez à un général qui s'amuserait à planter, déplanter des arbres pour nourrir de leurs fruits des soldats qui mourraient de faim. Je demande que l'Assemblée ordonne l'impression de ces discours pour s'occuper d'objets plus importants, et qu'elle entende le rapport de l'affaire de Rethel. Il est urgent de rendre justice à des bataillons patriotes indignement vexés par des généraux. (Applaudissements des tribunes.)


Plusieurs membres appuient la dernière proposition.


(La Convention suspend la discussion et accorde la parole au rapporteur de l'affaire survenue à Rethel, le 5 octobre 1792.)


 

La discussion était déjà pervertie. Marat ne lui donne que le coup de grâce. Je ne suis pas anti-Marat, mais le fait qu'il déconsidérait le sujet a forcément contribué à la question. Voir aussi le problème Rousseau.


___________________ _____


20 décembre

https://artflsrv04.uchicago.edu/philologic4.7/archparl/navigate/55/2/13/


/ p185 (en fait non, on s’intéresse à d'autres choses avant que Romme puisse commencer...)

/ fin page 186 - jusqu'à p195

« l'instruction publique considérée dans son ensemble » (puisque devenu le sujet depuis le 18...)

Ressemble beaucoup à son rapport d'octobre 1793.

Si ces débats de décembre 1792 n'ont abouti qu'au pauvre article1 (qui sera remis en question dès le prochain projet (Juin93 Sieyès-Daunou-Lakanal), car qui dit "primaire" dit "secondaire", et ils y étaient hostiles) , elles sont importantes dans le cheminement du sujet. On verra de nombreuses interventions de ce moment influer par la suite (l'obstruction au secondaire, le projet Romme, Bancal et Lepeletier.


Fin, Quinette demande impression, avec celui de Condorcet d'avril92.

/ annexe : le projet de Condorcet réimprimé (toute fin de la page 196 -225

(Romme faisait aussi partie du CIP de la Législative, d'ailleurs, il est l'auteur du rapport relatif aux finances)


L'assemblée vota l'impression du rapport et du projet de décret qui l'accompagnait.


(Voire page 201 du Tome 1 des PV du CIP sous la Convention

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k29288b/f297.image


(/JG : ont renoncé à la Société nationale.)



__________________ __


21 décembre

https://artflsrv04.uchicago.edu/philologic4.7/archparl/navigate/55/2/14/


p345 (fin). Discours de Rabaut-Saint-Etienne sur "l'éducation nationale".


On l'adjoint au Comité.


______________ _____


//22 décembre, puis précision sur le projet de Lepeletier présenté de façon posthume en juillet 1793 - par James Guillaume :


Le 22 décembre, le Comité décida que la question de l'instruction publique proprement dite continuerait à être traitée en comité général, mais qu'une section spéciale s'occuperait de l'éducation physique et morale, et qu'une autre section serait chargée de la partie économique et administrative du plan d'instruction.
La discussion du projet de décret sur les écoles primaires avait été indéfiniment ajournée par l'assemblée ; aucune décision n'avait encore été prise relativement au plan d'ensemble présenté par Romme. D'autres préoccupations s'étaient emparées des esprits. Pourtant, le 24 décembre, la Convention entendit encore un discours sur l'éducation populaire, que prononça le Girondin Bancal, un ami de Mme Roland. Bancal présenta, en son propre nom, un plan nouveau : il demanda qu'il n'y eût que deux degrés d'instruction, les écoles élémentaires et les écoles centrales, les premières établies dans chaque municipalité, les secondes au chef-lieu de chaque département. Il recommanda les exercices gymnastiques et militaires, ainsi que l'institution des fêtes nationales. Enfin, il proposa qu'on cessât de salarier le clergé, seul moyen, disait-il, de garantir la liberté des cultes.
Le projet de Bancal fut simplement renvoyé au Comité d'instruction publique. Il n'en fut plus question. Quant à son auteur, envoyé en avril 1793 à l'armée du Nord, avec Camus, Lamarque et Quinette, pour arrêter Dumouriez, il fut, ainsi que ses trois collègues et le ministre de la guerre Beurnonville, livré par Dumouriez aux Autrichiens, et resta en captivité pendant près de trois ans. Mais l'idée que Bancal avait jetée dans la discussion ne fut pas perdue : ce fut en effet son système qui finit par prévaloir, comme on le verra (pages 409 et 414) dans l'organisation définitive de l'enseignement public telle qu'elle fut votée en l'an IV.
Conception et rédaction du plan de Lepeletier. — C'est à ce moment qu'il faut signaler un projet qui, par la date de sa composition, appartient à la période où nous sommes. Il s'agit du fameux plan d'éducation commune de Michel Lepeletier : bien qu'il n'ait été connu et discuté que sept mois plus tard, c'est en décembre 1792 qu'il a été écrit, et peut-être encore dans les premiers jours de janvier (lorsque Michel Lepelelier fut assassiné le 20 janvier 1793, il portait dans la poche de son habit son plan, presque achevé), et c'est sur le projet de "Condorcet" et du Comité d'instruction publique qu'il vient se greffer. Lepeletier le dit expressément : « Le plan d'instruction publique du Comité me paraît fort satisfaisant: mais il n'a point traité de l'éducation ». Il est d'accord avec le Comité en ce qui concerne les degrés supérieurs d'instruction ; il veut, comme lui, des écoles secondaires, des instituts, des lycées. Sur un point seulement — point capital, il est vrai — il se sépare du Comité : au lieu de simples écoles primaires, il propose de créer des maisons d'éducation nationale, où les enfants seront élevés en commun, de l'âge de cinq ans, pour les deux sexes, à celui de douze pour les garçons et de onze pour les filles.
Ce serait donc à tort que l'on voudrait mettre, comme on l'a fait quelquefois, le plan de Lepeletier en opposition absolue avec celui de "Condorcet" : dans l'intention de son auteur, il n'en devait être que le complément. Nous parlerons du plan de Lepeletier à la date où il en fut donné lecture à la Convention (p. 385). [juillet 1793]



[suite. Quelques crapules entrent au comité (Chasset notamment).


/ Arbogast et le tableau, de février à mai.


La suite avec... le projet Sieyès - Daunou - Lakanal de juin 1793.