Clarifications à propos de l'instruction publique sous la Constituante


Il est manifeste que le 13 octobre 1790 est mal compris


Le travail remarquable et salutaire de James Guillaume à propos des comités d'instruction publique sous la Législative et la Convention n'a malheureusement pas concerné la Constituante, sinon dans l'introduction de l'ouvrage consacré à la Législative, en reproduisant une notice de Camus que JG présente comme étant "archiviste". C'est ce même texte qui est reproduit dans le dictionnaire de Ferdinand Buisson.

Or, Camus, protagoniste du 25 septembre 1791, transmet une synthèse biaisée, notamment à propos du 13 octobre 1790. 


(Je choisis James Guillaume afin de clarifier au sein de la qualité, parce que son ouvrage est digne d'étude, digne d'être poursuivi, amélioré.)


 

Intro J.G. CIP Législative relatif à la Constituante. 


Le "préambule" de l'introduction (page I et II) concerne le plan de la Législative, je l'évoquerai donc à ce moment. 

La partie I de l'introduction, page III, concerne la Constituante. 


https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k46892x/f9

https://archive.org/details/procsverbauxdu01fran/page/n11/mode/2up



Le texte de James Guillaume ne concerne que la page IIII et la moitié de la page IV. La suite est le texte de Camus. 


Le Comité de constitution reçut le mandat, en octobre 1790, de faire un rapport sur les vues qui avaient été présentées à l'Assemblée, de différents côtés, relativement à l'éducation : ce fut l'origine du volumineux travail de Talleyrand, dont la Constituante entendit la lecture dans ses séances des 10, 11 et 19 septembre 1791; arrivée au terme de ses travaux, elle ne put songer à en entreprendre l'examen, et elle se borna à le renvoyer à l'Assemblée qui allait la remplacer. Mais celle-ci ne montra aucun empressement à recueillir un legs dont elle se souciait peu, et le Comité d'instruction publique l'écarta par un vote formel dans sa séance du 25 novembre 1791 : en sorte que le rapport de Talleyrand, imprimé mais non discuté, demeura à l'état de simple monument littéraire. 


Ici, J.G. ne fait que répéter la version biaisée de Camus (voir plus bas). Le 13 octobre n'est pas l'histoire de "le comité de constitution reçoit le mandat", mais "Talleyrand interdit de s'occuper d'instruction publique". 

Le 19 septembre est une erreur. Oubli des débats du 25 septembre 1791.

...


L'œuvre de la Constituante et de ses comités, en matière d'instruction publique, a été résumée dans un document semi-officiel : une notice rédigée par l'archiviste Camus en 1792. 
Nous ne saurions mieux faire que de reproduire ici intégralement cette pièce peu connue, où l'on trouvera une énumération complète des décrets rendus par la Constituante sur la matière, ainsi que des ouvrages et des projets qui lui ont été présentés


"L'archiviste" Camus n'est pas très représentatif de Armand-Gaston Camus, qui a été un député très actif sous la Constituante (dont il est question). Son regard est loin d'être neutre. Il est par exemple protagoniste de la discussion du 25 septembre 1791.

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Camus


L'Assemblée constituante a laissé à l'assemblée qui devait la remplacer ce grand et superbe travail, du succès duquel le maintien de la constitution dépend. Il avait cependant été préparé, dans l'Assemblée même, plusieurs recherches sur cet objet: on lui avait présenté divers projets sur l'éducation et les beaux-arts. C'est ce dont je me propose de rendre compte, ainsi que des décrets qui ont été prononcés pour conserver en attendant qu'on recréât. Il ne faut pas que la postérité croie que les membres de l'Assemblée constituante aient ignoré quels avantages les lettres, les sciences et les beaux-arts procurent à une nation, ou qu'ils n'aient pas su les apprécier. 


On ne croit pas, on constate. 

...


Le Comité de constitution ayant été chargé, par un décret du 13 octobre 1790, de recueillir toutes les vues présentées à l'Assemblée sur l'éducation, et d'en faire son rapport, on annonça, dans le commencement de l'année 1791, un rapport de M. de Talleyrand, ancien évêque d'Autun, membre du Comité de constitution. 


Non, le 13 octobre ne charge pas de recueillir, il entrave. 



Les bases de l'éducation nationale étaient un des objets dont l'Assemblée avait décrété, le i er janvier 1791, de s'occuper sans interruption dans ses séances du matin; mais l'importance de la matière, et le développement que M. de Talleyrand donna à son plan d'éducation, en retardèrent la publication. Ce ne fut qu'au mois de septembre 1791, les 10, 11 et 19, que le rapport fut fait à l'Assemblée et imprimé par son ordre. 


Le 1er janvier, x, x, x, x, l'IP est en xe position. Jamais mis en application. 

Le 19 est une erreur, correspond peut être à quelque chose d'inaccessible via les AP.


L'Assemblée était alors trop voisine du terme de ses séances pour s'occuper d'un si grand travail ; elle se vit obligée de le renvoyer à la prochaine législature. 


!! C'est lui-même qui a contribué à ajourner la discussion. 


...



Le 13 octobre 1790, l'Assemblée rendit, sur le rapport de M. l'ancien évêque d'Autun, un décret important, dont le premier article eut pour objet, comme je l'ai déjà annoncé [page vi] , de déclarer qu'elle ne s'occuperait d'aucune des parties de l'instruction jusqu'au moment où le Comité de constitution lui présenterait un travail relatif à cette partie de la constitution.


Il l'avait "annoncé" un peu différemment.


Le motif de cet article fut de prévenir l'incohérence qui se trouverait un jour dans l'ensemble, si l'on souffrait qu'on proposât partiellement des décrets qui n'auraient pas une liaison nécessaire entre eux. 




Quelques points

- le 13 octobre, le projet de Guillotin n'est pas écrit, il vient de créer un comité chargé de s'occuper de ces questions. Talleyrand interdit à ce comité de parler d'IP devant l'assemblée avant qu'il ait présenté son projet. Le projet du comité ne sera présenté qu'en septembre 1791. 

Il n'y a aucun autre rapport entre le projet de Guillotin et le 13 octobre 1790 que l'interdiction de Talleyrand, ce pourquoi évoqué en appendice - raison pour laquelle le projet ne fut pas présenté et publié en annexe. 


- le 13 octobre le rend dépendant de Talleyrand

Guillotin est le premier de la liste de tous ceux qui ont du attendre Talleyrand pour aborder un sujet relatif à l’instruction publique, donc la fin de la Constituante, dont la défaite du projet Talleyrand a annihilé l'existence. 

Ce n'est pas en septembre 1791 que Talleyrand a obstrué Guillotin, en septembre ils tombent ensemble


La question n'est pas une éventuelle inimitié entre talleyrand et guillotin, la défaite du projet talleyrand est ce qui a achevé celui de Guillotin. 

A été obligé d'attendre et de partager la défaite. 


(quelques rectifications ci-dessus réagissent à un ouvrage biographique sur Guillotin comportant des énormités spectaculaires)



Discussion. L'application des décrets de la "nuit du 4 aout 1789" (du 4 au 11) et l'instruction publique.




Larocheoucauld-Liancourt (ce grand philanthrope)


Touche à la fois le sujet de l'instruction publique et celui de la médecine, santé, hygiène


Le projet de Guillotin devrait aussi évoquer la date du 14 septembre 1790. 

Il ne concernait pas que les écoles de médecine, mais toute une politique publique, et ce sujet a été accaparé par Liancourt le 14 septembre, ce qui a servi d'exemple à Talleyrand le 13 octobre. Lui aussi a vu la Constituante se terminer sans qu'il n'ait quasiment rien accompli, sinon de mettre les mendiants en prison, son projet rejeté (même pas discuté) à la toute fin alors qu'il avait fait attendre en s'appropriant. 

Un article récent abordant la question de l’hygiène sous la Révolution néglige la responsabilité de L-L.

(Je n'aborde pas ici la rhétorique malhonnête post-thermidorienne de Fourcroy (/Romme en octobre 93 aborde la médecine)